L’essor des nouvelles mobilités : quels impacts pour l’assurance ?
ÉconomieMatin.fr
– le 1 juillet 2024
Le secteur des nouvelles mobilités connaît une croissance significative ces dernières années. Cette tendance est renforcée par des évolutions dans le mode de vie des Français, résultant de divers évènements :
En premier lieu, cet essor s’explique par la crainte des transports publics, initialement liée au risque accru de contamination pendant la pandémie de COVID-19. Cependant, même après le retour à une vie « normale », cette crainte a persisté, se transformant en une fatigue générale des transports en commun.
L’entrée en vigueur en 2020 du forfait mobilités durables, un dispositif financier de soutien aux salariés du secteur privé et agents de services publics pour leurs déplacements domicile-travail à mobilité douce, explique également ce changement ;
La prise de conscience sur les émissions polluantes causées par l’utilisation de la voiture personnelle a encouragé la population à les réduire, préférant le recours à des mobilités douces.
L’inflation du prix du carburant depuis le début de l’année 2023 a également conduit de nombreux usagers à se diriger vers de nouvelles formes de mobilités.
Prenons l’exemple de Paris ou Marseille pour illustrer la manière dont ces nouveaux engins se sont imposés dans notre quotidien. Les trottinettes électriques ont en effet envahi les rues de ces villes et font désormais partie du paysage (et des trottoirs), parfois au péril de la sécurité des piétons.
Ce nouveau mode de transport est consacré par le code de la route depuis le 25 octobre 2019 qui le définit comme un « engin personnel de déplacement motorisé » (EPDM), lequel entre donc dans la catégorie des véhicules terrestres à moteur. Aussi, la souscription d’une assurance responsabilité civile (RC) à minima est obligatoire (article L211‑1 du code des assurances) afin de couvrir les dommages qui seraient causés par son utilisation. Le non-respect de cette obligation entraînant une amende pouvant aller jusqu’à 7 500 euros en cas de récidive.
Concernant le vélo à assistance électrique (VAE), les ventes ont augmenté de 12% en 2022, soit 738.454 VAE vendus au cours de l’année. A l’inverse, les ventes de vélos traditionnels ont chuté de 13 % la même année.
C’est donc sans surprise que le cadre légal est venu régir ces nouvelles mobilités.
L’assurance n’est pas obligatoire pour le VAE, si la vitesse de celui-ci n’excède pas 25 km/h (la puissance du moteur du vélo électrique doit être inférieure ou égale à 250 watts). Au-delà, l’engin est considéré comme un cyclomoteur ou « speedbike » et doit obéir aux règles afférentes : il doit notamment être immatriculé (art. R322‑1 code de la route) et doit donc être assuré.
Ces évolutions légales n’ont donc pas échappé aux assureurs, lesquels ont su opérer une [nécessaire] adaptation de leurs offres afin de couvrir ces nouveaux véhicules, certains étant notamment régis par le code de la route.
Le cas de la trottinette électrique illustre parfaitement l’impact des nouvelles mobilités sur l’assurance : ce véhicule doit faire l’objet d’une garantie à part entière ou d’un contrat spécifique et ne peut être intégré à l’assurance multirisque habitation. Il s’agit là d’une assurance obligatoire qui peut bien sûr, être complétée par plusieurs garanties comme celle du conducteur pour couvrir ses propres dommages ou encore, celle relative au bien en lui-même pour couvrir un éventuel vol ou des dégradations.
Avec l’obligation d’assurer les EDPM et cyclo mobiles légers, Allianz s’est par exemple positionné sur le marché en 2017 avec une offre « Assurance nouvelles mobilités » proposant 2 formules :
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La première offre une couverture minimale, comprenant la RC qui vise à indemniser les tiers victimes, ainsi que la garantie défense pénale et recours, mobilisable en cas d’évènement accidentel. Cette garantie intervient en cas de poursuites pénales engagées à l’encontre de l’assuré et/ou pour réclamer une indemnisation en cas d’identification du tiers responsable.
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La seconde inclut la RC et ajoute une garantie d’indemnisation en cas de dommages corporels.
Aujourd’hui, la majorité des assureurs a, de la même manière, enrichi son offre afin de couvrir ces nouvelles mobilités.
C’est le cas de MMA par exemple, avec son offre VAE qui propose différentes formules : la Premium qui prend notamment en charge le vol en tous lieux et la casse.
L’offre Elite + est enrichie d’une garantie Voyages qui permet l’extension de la couverture dans le monde entier.
Si les équipements individuels semblent s’installer de manière pérenne dans nos habitudes de transport, l’essor des flottes reste à nuancer. Après l’effet post-covid et un déploiement massif, des sociétés ont été contraintes de retirer leurs offres, non sans conséquences financières pour les assureurs partenaires.
Le récent retrait des trottinettes électriques en libre-service à Paris ou encore la cessation de paiement de Cityscoot (société de location de scooters électriques), ayant conduit à son rachat par une société espagnole (Cooltra), interrogent sur la trajectoire de ces nouveaux engins.
Si le marché de la micromobilité est prometteur, des obstacles mettent malgré tout les assureurs en difficulté. Les évolutions techniques continuent de se poursuivre et font apparaître de nouveaux engins entrant dans la vie des Français, lesquelles étant prises en compte par le législateur, entraînent une constante adaptation des assureurs pour couvrir ces nouveaux risques. Cet exercice est porteur de complexité pour leur activité, d’autant que l’avenir de ces mobilités demeure incertain.
En outre, le manque de recul et la faible quantité de données disponibles ont pour conséquence un exercice complexe de tarification des offres ; les assureurs naviguent parfois sur un fleuve encore inconnu, avec une maîtrise du risque limitée.
Un autre des obstacles majeurs à la croissance de l’activité de l’assurance pour les EDPM réside dans la connaissance même des obligations légales. Selon une étude de la Fédération Française de l’Assurance menée en 2020, un tiers des propriétaires d’EDPM n’a pas connaissance de l’obligation de souscrire une assurance RC. Un renforcement de la sensibilisation menée auprès des usagers par les assureurs ou par les pouvoirs publics semble donc crucial.
Par Naïma Soualhi, Project Manager et Christophe Choï, Consultant Sénior chez Square Management.
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