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ITRNews

– le 27 décembre 2021
Au cours de cette dernière décennie, l’usage du numérique a explosé, notamment lors de la pandémie du Covid-19. De ce fait, créer des espaces pour entreposer les données ainsi générées n’a jamais été aussi urgent. L’enjeu est de trouver l’équilibre entre cette forte nécessité de stockage, attrayante pour l’économie digitale, et les complications environnementales et sanitaires qu’entraîne le développement des data centers. Une tribune de Clotilde Patarin, consultante data chez Square.

L’éruption des data centers

Un data center, ou centre de données, est composé d’un grand nombre de systèmes informatiques en réseau permettant de stocker, exploiter et distribuer une volumétrie considérable de données à l’international. Ces dix dernières années, le nombre d’internautes a doublé, bien que cela ne concerne toujours que la moitié de la population mondiale. Cela a eu pour effet une augmentation annuelle de la consommation de données d’environ 50%1. Ceci est lié, en partie, à la généralisation du télétravail et de la visioconférence en lien avec la crise sanitaire. Tout cela a entraîné une incroyable augmentation du nombre de data centers (multiplication par 14 entre 2012 et 2021) pour atteindre le record de 7,2 millions de data centers dans le monde2.

Une avalanche de répercussions environnementales

L’intérêt d’implanter un data center est économique pour les territoires : il permet d’attirer les entreprises numériques. Malgré cela, ces centres sont très contestés. Ils ont, en effet, un impact important sur l’environnement : gros consommateurs d’eau pour leurs systèmes de refroidissement, et naturellement de pétrole et d’électricité. Très énergivore, la consommation en électricité d’un data center (de taille moyenne) équivaut à celle d’une ville de 50 000 habitants3. L’ensemble de ces centres représente d’ailleurs presque 10 % de la consommation mondiale d’électricité4. Parmi tous les acteurs du numérique, ce sous-secteur a l’empreinte carbone qui croît le plus fortement, et celle-ci serait d’ailleurs plus importante au total que celle de tous les pays, à l’exception des Etats-Unis, de la Chine et de l’Inde. Ils représentent ainsi près de 2 % des émissions totales de CO25 : c’est ce qu’on appelle la pollution numérique. Il est intéressant de noter que 40 % de l’énergie est consacrée au refroidissement de leurs équipements informatiques6. En effet, un volume conséquent de chaleur émane de ces derniers dans l’environnement qu’on essaie d’atténuer par des climatiseurs.

Néanmoins, une exposition prolongée aux ondes électromagnétiques et au bruit diffusés par ces derniers est dangereuse pour l’Homme. Vis-à-vis de notre santé, le stockage de fioul destiné aux batteries de secours en cas de panne est également risqué, tout comme pour l’environnement dont les composants, mais aussi ceux des serveurs, constituent des déchets toxiques. Outre la consommation électrique, les centres de données sont également très gourmands en eau : des millions de mètres cubes d’eau potable, d’ailleurs traités avec des produits chimiques polluants, sont gaspillés pour le refroidissement des centres. À tout cela s’ajoute un fort risque d’incendie dû à la surchauffe potentielle des systèmes informatiques utilisés.

Emissions de solutions

De nouvelles solutions sont cependant proposées pour répondre à ces problématiques qui s’appuient sur les principes de l’économie circulaire. Le but serait à terme d’atteindre une neutralité parfaite en carbone. La société Stratosfair7 a dernièrement présenté son projet de construction du premier data center local bas carbone, proche de Lorient. L’idée serait de réinjecter la chaleur émise par les systèmes dans une serre urbaine. Les data centers DigiPlex8 réutilisent déjà cette chaleur pour le chauffage des logements. Des entreprises comme Scalewayou Thésée10 développent même des centres capables de se passer de climatisation en utilisant plutôt l’air extérieur pour refroidir les systèmes et en se passant ainsi de gaz frigorigènes : c’est ce qu’on appelle le « free cooling ». Ceux-ci dépensent en moyenne 30 à 35%9 moins d’énergie qu’un centre de données plus classique et prolongent ainsi la durée de vie de leurs différents équipements. Ce sont également des centres dont l’appétit en eau est moindre : environ 260 mètres cubes d’eau consommés par an10, quand un foyer français en consomme environ 15011. Autre exemple, le « Green Data Center » de Grenoble12 : il utilise l’eau du Drac pour refroidir son système et l’électricité est produite par ses propres panneaux solaires. L’entreprise souhaite aussi valoriser la chaleur rejetée au profit des entreprises voisines. En ce qui concerne les risques d’incendie, il est nécessaire de s’implanter à l’écart des zones sujettes aux risques climatiques et de construire des bâtiments étanches et résistants.

Pour résoudre ce dilemme croissant des centres de données, les entreprises doivent prendre conscience qu’il existe des technologies offrant le double avantage d’optimiser les performances tout en réduisant les impacts environnementaux et sanitaires. Par ailleurs, pourquoi ne pas utiliser la donnée elle-même pour pallier risques que son stockage génère ? Des modèles de prédiction des risques climatiques et l’exploitation des variables de température, d’humidité et de flux pourraient être des moyens d’améliorer l’efficacité, et ainsi diminuer les coûts et par la même occasion la consommation électrique.

Par Clotilde Patarin, consultante chez Square.

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