Le Courrier Financier
– le 19 août 2022
L’émergence de ces nouveaux types d’actifs s’inscrivent dans un profond changement de paradigme dans le système financier actuel au sein duquel la BCE doit jouer un rôle important en encourageant la régulation et en étant force de proposition, notamment sur la monnaie numérique. Il existe désormais un marché financier parallèle au marché traditionnel décentralisé et désintermédié dans lequel les banques traditionnelles et les fintechs ont également un rôle à jouer.
Dans ce contexte de profond changement, quels sont les enjeux auxquels doivent faire face les banques centrales, en particulier la BCE et quel rôle doit-elle jouer en cohabitation avec d’autres acteurs du secteur ?
La numérisation du paysage financier : une tendance lourde dans laquelle les crypto actifs ont trouvé leur place
Technology, DLT) popularisé par le Bitcoin. Ce système désigne l’enregistrement de chacune des opérations et transactions effectuées au sein d’une blockchain.
On assiste donc à un développement important des crypto-monnaies (dont on en dénombrait plus de 10 514 le 9 novembre 2021), actifs numériques présentant un grand nombre d’avantages potentiels pour les consommateurs : désintermédiation des échanges, immédiateté et confidentialité des transactions, reprise en main et suivi en direct des investissements, abaissement des barrières pour les échanges transfrontalier et enfin vecteur d’inclusion financière. A ce jour, les crypto-monnaies, ont séduit plus de 8% des Français tandis que seulement 6,7% d’entre eux ont investi dans des actions alors que 30% souhaitent investir dans des crypto actifs.
Face à ce changement profond, les banques centrales mondiales ont réagi à des rythmes différents selon les pays. Certaines banques centrales ont lancé leur propre monnaie numérique (85% des banques centrales développent actuellement des monnaies numériques de banque centrale (MNBC) dont la Chine et la Suède) tandis que d’’autres sont encore en phase de réflexion et de test (c’est le cas de la BCE).
Face à des risques majeurs, l’euro numérique constitue une réponse de la BCE
L’absence de garanties juridiques et donc de protection en cas de perte, vol, etc. de ces actifs est également une lacune majeure de ce néo système. Ce sont ainsi 700 millions de dollars qui auraient été dérobés au premier trimestre 2022. Chiffres qui ne prennent pas en compte l’attaque de la blockchain Ronin révélée le 29 mars dernier et dont le butin est de plus de 600 millions de dollars.
Enfin, il est important de garder à l’esprit que chaque cryptomonnaie répond à une gouvernance, or celle-ci n’est en aucun cas une garantie juridique accordée au détenteur d’asset comme l’a mis en lumière l’affaire Juno au début du mois de mars.
C’est dans ce contexte que la BCE poursuit ses travaux entamés en octobre 2020 sur la création d’un euro numérique de détail et interbancaire et ce alors que plus de 85% des banques centrales développent des monnaies numériques (MNBC) et que 8 pays ont déjà lancés leur propre monnaie digitale. L’émission de cette forme numérique de l’euro, en parallèle de l’euro fiduciaire, vise à rétablir le rôle de BCE là où les émetteurs de nouveaux actifs numériques et les entreprises privées ont pris le pas. Les ambitions de cette nouvelle monnaie numérique sont claires selon Augustin Carstens, directeur général de la Banque des règlements internationaux : faire bénéficiers au public des apports de cette numérisation en terme d’inclusion financière, de garantie d’efficacité et d’interopérabilité des flux entre les différents systèmes et d’amélioration des échanges transfrontaliers tout en préservant la stabilité monétaire et la durabilité des investissement.
Cette garantie passe, selon ce dernier, par le maintien la stabilité des prix et la confiance du public dans la monnaie flat en assurant un accès non risqué à la monnaie de banque centrale. L’institution retrouve par cette démarche son rôle unificateur afin de prévenir une fragmentation des marchés financiers et de la liquidité liée au risque majeur d’approches désordonnées et trop hétérogènes dans l’évolution des infrastructures de marché.
Comment les banques centrales, traditionnelles et les fintech pourront-elles cohabiter ?
Les fintech sauront se rendre indispensables dans ce nouvel écosystème financier ouvert, plus mobile et centré client. A ce jour, on en dénombre plus de 10 000 (et rien que 600 en France) 7 qui proposent d’une part des solutions numériques visant à faciliter, fluidifier et rendre encore plus accessibles les transactions bancaires, et d’autre part qui proposent des solutions technologiques structurelles innovantes en parallèle du système bancaire traditionnel. La blockchain étant pour lors très largement représentée.
L’enjeu principal des banques traditionnelles qui se dessine pour ces prochaines années, avec les changements structurels majeurs que cela incombe, est d’accompagner ces nouvelles monnaies numériques de banques centrales et ces nouvelles catégories d’actifs tout en intégrant ces nouvelles structures technologiques, telle que la blockchain dans leur système de production.
Par Amaury Semadeni, Consultant Square Management.
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