Silicon.fr
– le 31 juillet 2020
Avec un marché à 8 milliards de $ en 2018 et qui devrait atteindre 46 milliards en 2023[0], le no/low code s’impose comme un mouvement clé dans le domaine de l’IT.
Ces outils permettent de créer des sites/logiciels/applications sans connaissance en programmation informatique. Ils sont de plus en plus plébiscités par les entreprises afin d’accélérer et alléger financièrement le développement de projets.
Initialement investis par des startups comme Webflow, Bubble ou encore le pionnier WordPress au début des années 2000, c’est désormais au tour des GAFAM de s’introduire sur ce marché porteur en investissant des millions sur ces outils [0.5]
Retour sur ce mouvement
Une commoditisation de la technologie :
C’est dans les années 80, aux balbutiements du développement informatique, que les premières réflexions sur le no-code voient le jour. Sous l’impulsion de son ouvrage « Application Development without Programmers », James Martin soutient que de nombreux problèmes peuvent être résolus en fournissant aux utilisateurs les outils leur permettant de développer en autonomie des applications. [1]
Au milieu des années 2000, des outils comme WordPress ou Squarespace transforment la face du web en permettant de personnaliser et publier un site web sans compétences techniques.
C’est l’avènement du blogging et l’émergence de nouveaux écosystèmes en ligne. Une génération plus tard, plus d’un tiers des sites web sont propulsés par WordPress. [2]
Aujourd’hui, ce sont des services de reconnaissance faciale, signature électronique ou encore automatisation de tâches qui peuvent être déployés en quelques minutes et sans équipe technique. [2.5] Ce qui nécessitait de l’ingénierie et des centaines de milliers d’euros d’investissement, il y a encore quelques années, est aujourd’hui une commodité accessible pour quelques dizaines d’euros par mois.
Cette commoditisation de la technologie est paradoxalement portée par des équipes de développeurs et ingénieurs. Elles passent des milliers d’heures à construire des interfaces, architectures et outils, en portant une attention toute particulière sur la propreté de leur code, la correction des bugs, la sécurité ou encore les mises à jour de leur(s) solution(s).
L’émergence de nouveaux concepteurs
Cette évolution dans le rapport aux outils numériques remodèle les champs de compétences et démultiplie l’horizon des possibles de chacun.
La barrière de la capacité technique, limitée par l’accès à l’éducation, devient beaucoup moins importante. Le besoin de capital financier pour initier le moindre projet s’effondre.
L’identité des concepteurs change. Les non-diplômés, populations issues des milieux défavorisés ou tout simplement sans appétence pour la programmation, peuvent désormais concevoir des produits digitaux. Il en émerge une nouvelle vague de créateurs en ligne plus diversifiée.
Ces populations, sous-représentées dans l’écosystème digital, s’ouvrent de nouvelles perspectives en mettant à profit leurs idées et expériences. Ce changement d’identité des concepteurs peut avoir un effet transformateur sur les entreprises et les individus.
En France, l’association Pour Toi L’Entrepreneur, accompagnant des porteurs de projets issus des banlieues, offre des formations au no-code. En plus de la simplicité de prise en main et le coût dérisoire de ces outils, le gap entre l’idée et le lancement du projet est drastiquement raccourci.
Avec des coûts de structure quasiment réduit au néant, la digitalisation d’activités au niveau ultra-local, parfois à l’échelle d’un quartier, devient économiquement viable. Un nouveau groupe de produits, qui n’auraient pas eu de sens à être créé par manque de rentabilité, voit le jour.
Alléger le département IT :
Ce changement de nature des concepteurs change, de facto, la façon dont les entreprises testent et construisent leurs produits/outils.
Cette opportunité du no/low code rend possible la résolution rapide et à moindre coût des problématiques business. En accédant à ces nouveaux outils, les entreprises n’ont plus besoin d’arbitrer et prioriser les sujets à développer par manque de budget ou compétences.
À la SNCF, ce sont par exemple des dizaines d’applications métiers qui ont été créées par des collaborateurs pour répondre à leur propre besoin. [4]
L’opportunité est d’autant plus grande face à la pénurie des développeurs entrainant une flambée des prix [3]. Le no/low code n’étant pas forcément une ébauche ou un prototype, certaines sociétés font même le choix de passer de projet « code » à « no-code » pour abaisser les coûts latents (maintenance, mise à jour, dette technique…). Il en résulte une plus grande agilité et autonomie des équipes non-techniques.
Les développeurs ne sont cependant pas en voie de disparition, ils peuvent au contraire se concentrer sur les aspects techniques au sein de projets à haute valeur ajoutée (API, sécurité, R&D, …). De plus, les concepteurs non-techniques ne peuvent pas réaliser certains développements très spécifiques et restent tributaires des outils fournit par les développeurs.
Des perspectives prometteuses
Comme cela a été le cas dans d’autres industries, lorsque les moyens de création sont rendus plus accessibles, le volume et l’ampleur de ce qui est créé explose. Dans le monde du logiciel, le mouvement du « no-code » suit cette même voie.
[0] https://www.globenewswire.com/news-release/2019/02/25/1741822/0/en/Rapid-Application-Development-Low-code-and-No-code-Market-Global-Forecast-to-2023.html
[0.5] https://techcrunch.com/2020/06/24/aws-launches-amazon-honeycode-a-no-code-mobile-and-web-app-builder
[1] https://dl.acm.org/doi/10.1145/1040694.1040697- [ (Martin, 1982, p. 55).
[2] https://w3techs.com/technologies/details/cm-wordpress & https://w3techs.com/technologies [2.5] https://passbase.com/ —- https://zapier.com/ —-
[3] https://www.wsj.com/articles/americas-got-talent-just-not-enough-in-it-11571168626
[3.5] https://www.youtube.com/watch?v=baHz-cr4DAU // https://pakwired.com/tara-reed-a-millionaire-who-built-an-app-without-knowing-how-to-code/
[4] https://powerapps.microsoft.com/fr-fr/blog/sncf-power-platform-customer-success-story/
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