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Environnement Magazine

– le 08 septembre 2022
Un ordinateur avec tous ses composants électroniques peut paraître inoffensif au premier abord, mais « aujourd’hui il est clair que le monde du numérique contribue bel et bien au réchauffement de notre planète ».
Quand on parle de réchauffement climatique, d’émission de CO2 ou de gaz à effet de serre (GES), on a souvent tendance à penser directement au secteur automobile ou au secteur de l’aviation. Cependant, de nos jours, le secteur numérique fait bien plus de dégâts. D’après une étude menée par Laurie Marraul (1), maîtresse de conférences et enseignante chercheuse à l’EHESP de Rennes, « Le numérique produit environ 4% des gaz à effet de serre (GES) de la planète quand le trafic aérien (en temps normal, avant le Covid) n’en génère que 2% ».

Des téléphones aux ordinateurs portables, en passant par les consoles de jeux vidéo, tous les composants électroniques connectés en ligne sont sources de pollution, notamment en augmentant les émissions de gaz à effet de serre ou de CO2 des routeurs et des data centers qui sont utilisés pour faire transiter ou stocker ces informations. La pollution qui est liée au secteur du numérique n’est peut-être pas visible à l’œil nu, mais la quantité d’énergie utilisée par tous ces appareils électroniques augmente de 6% par an, d’après le rapport 2020 du Shift Project — un groupe de réflexion français qui prône le passage à une économie post-carbone. Aujourd’hui, selon une étude de Greenit, une société de conseil en technologies de l’information et de la communication durables, on comptabilise 34 milliards d’objets connectés dans le monde.

Pour mieux visualiser et comprendre l’impact du numérique, un rapport (2) a été publié par ces derniers nommé « iNum » spécifiant que :

  • Envoyer un email avec une pièce jointe équivaut à allumer une ampoule pendant une heure
  • 1 mail stocké pendant 1 an correspond à 10g de CO2 émis dans l’air.
  • 281 milliards de mails sont envoyés tous les jours dans le monde. En prenant une moyenne de 4g de CO2 émis par email envoyé, on en arrive à un chiffre de 410 millions de tonnes de CO2 générées chaque année (3).

Ces chiffres donnent une idée de la consommation énergétique que peut représenter notre empreinte numérique. La consommation des data centers (4) est passée de 53,9 TWh/an à 76,8 TWh/an entre 2010 et 2018. D’après une émission de France Culture intitulée « Big data : des chiffres et des chiffres », diffusée le 06/09/2017, le volume d’informations qui existe sur internet et qui est par conséquent stockée dans des data centers double tous les 2 ans. Compte-tenu de la préoccupation croissante des consommateurs, les entreprises se retrouvent obligées de prendre en considération ce facteur de pollution.

La réduction des émissions de GES : une opportunité pour les entreprises 

Aujourd’hui, les émissions de GES sont au cœur d’un grand nombre de nouvelles réglementations et de normes qui touchent particulièrement les secteurs du numérique. Ces réglementations imposent aux entreprises d’adopter une démarche de développement durable en prenant en considération leur impact sur l’environnement. En France, le sénat a voté une nouvelle loi le 15 Novembre 2021 visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France (5). Cette loi a vocation à rendre responsable tous les acteurs du numérique – professionnels et consommateurs. Elle s’articule autour de 5 objectifs :
  • Prendre conscience de l’impact du numérique sur l’environnement
  • Promouvoir et encourager le recyclage des appareils électronique
  • Favoriser une utilisation écologiquement vertueuse
  • Diminuer la consommation des data centers et des réseaux
  • Promouvoir des stratégies numériques responsables dans les territoires.

Suite à une prise de conscience collective, les entreprises du secteur du numérique ont rapidement saisi ce nouveau vecteur de croissance afin de fidéliser et d’attirer de nouveaux clients. La démarche RSE a donc été mise en place et permet la création de valeur à l’entreprise. C’est une vision de croissance durable et responsable qui vise aussi à réduire la consommation tout en améliorant la satisfaction client.

De plus, les entreprises du service numérique (ESN) ont vite compris qu’avoir une vision éthique et inclusive permet de renforcer la « marque employeur » et le sentiment de fierté et d’appartenance des salariés. Des collaborateurs en accord avec la stratégie de l’entreprise seront toujours plus motivés que ceux qui y sont indifférents, car cela donne du sens et de l’importance à leurs actes. Cela améliore leur productivité, leur créativité, et leur état d’esprit.

Une étude de France Stratégie, une institution rattachée au premier ministre français, montre que la différence de performance entre les entreprises qui introduisent la RSE et celles qui ne le font pas est de 13% en moyenne.

RSE ou finance verte, un gage de croissance

Promouvoir une démarche RSE sur l’ensemble de la chaîne est aussi une manière d’innover et de transformer et rendre les processus actuels plus efficients. Néanmoins, la contrainte réglementaire a vocation aussi à transformer le modèle économique des entreprises et générer à terme des économies significatives. De cette façon, il est possible de diminuer les coûts et augmenter les profits d’une part, et de gagner des parts de marché d’autre part.

Pour s’imposer de façon durable et pérenne, et atteindre le cœur et l’esprit d’un maximum de personnes, les entreprises ont l’opportunité de faire évoluer leurs pratiques en considérant la démarche RSE ou la finance verte comme un gage de croissance, mais également en valorisant l’amélioration de la consommation d’énergie, l’utilisation des énergies renouvelable, et la mise en place d’un maximum de pratiques qui seront favorables à l’environnement. De cette façon, ces entreprises amélioreront leurs images d’employeurs et leurs réputations, attireront des employés plus performants et productifs, créeront un nouveau marché favorable à l’environnement, et surtout seront soutenues par l’opinion publique. Prendre en considération les enjeux environnementaux et les besoins sociétaux, et mettre en place des pratiques saines et pérennes sont de nos jours, les clefs du succès.

Sources

(1) Catherine Deunf, 03/05/2021, « Le numérique plus émetteur de CO2 que l’aviation, selon une chercheuse de l’EHESP de Rennes », https://france3-regions.francetvinfo.fr/bretagne/ille-et-vilaine/rennes/le-numerique-plus-emetteur-de-co2-que-l-aviation-selon-une-chercheuse-de-l-ehesp-de-rennes-2068717.html

(2) Anaïs Fleury, 09/2021, « Qu’est-ce que la pollution numérique, et comment lutter contre ? », https://www.hellocarbo.com/blog/reduire/pollution-numerique/

(3) Greenly, 20/10/2021, « Quelle est l’empreinte carbone d’un mail ? », https://www.greenly.earth/blog/quelle-est-lempreinte-carbone-dun-mail

(4) Sana, 04/10/2021, « Datacenters : la consommation d’énergie au cœur de nos priorités », https://www.euclyde.com/datacenter-consommation-energie/

(5) Legifrance, 2021, « LOI n° 2021–1485 du 15 novembre 2021 visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France », https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044327272

Par Khaled Jaffal, Consultant Senior Square Management.

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